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J’ai lu: Inyenzi ou les cafards de Scholastique Mukasonga

Scholastique Mukasonga écrit pour honorer ses défunts. 37. Père, mère, frère, sœurs, neveux, nièces, beaux-frères, belle-sœur…

Les mots sont ce linceul qu’elle n’a pas pu leur offrir. Elle écrit leur nom encore et encore dans un cahier qui devient un tombeau de papier. Elle relate leur histoire pour leur accorder une sépulture éternelle dans nos mémoires.

Vous connaissez sûrement le génocide Rwandais de 1994, un évènement tragique souvent abordé dans les médias, surtout en Avril, à l’approche de la date anniversaire. Mais beaucoup ignorent que bien avant cela dans les années 50, 60 et 70 déjà, plusieurs pogroms ont visé les Tutsis.

Ils ont été déplacés de force, exilés dans leur propre pays, déportés sur des terres arides sans eau à moins d’une journée de marche, obligés à cultiver du café, réduisant leur lopin de terre destiné au vivrier à une peau de chagrin.C’est sous la menace des bâtons et hors de l’intimité d’un isoloir qu’ils ont dû voter pour l’homme qui avait juré de les anéantir.

Scholastique nous parle des enlèvements, des arrestations abusives, des brimades, des mariages forcés. Elle nous explique comment ils étaient assignés à résidence, soumis à un couvre-feu, humiliés et bousculés à la moindre occasion.

Elle parle de leur dénuement: sa sœur et elle partageaient une seule robe, allant à l’école en alternance. C’est un livre difficile à lire. Il est si court pourtant. Les mots sont si simples pourtant. Mais il porte le poids des tragédies historiques. On connaît déjà la fin de l’histoire. Il n’y a pas eu de happy-end et ça fait mal au coeur. On partage l’itinéraire de douleur de Mukasonga.

Je me demande pourquoi ils sont restés aussi longtemps sachant ce qui les attendait ? Pourquoi ne pas avoir tous fuit au Burundi ? Combien de fois peut-on échapper à la faucheuse avant qu’elle fasse son office?

Est-ce le cordon ombilical qui les rattachait à leur terre qui était si difficile à trancher ?

Est-ce l’espoir que les choses vont changer, l’espoir qu’un jour les gens se rendront compte de l’incongruité de leur haine, de la misère de leur comportement qui les a fait tenir ? Comment une mère, un père arrivent à choisir dans leur progéniture ceux à qui ils offriront une chance de survivre en les aidant à fuir ? Peut-on pardonner l’impardonnable ?

Autant de questions auxquelles personne ne devraient avoir à répondre.

L’auteure n’a pas pardonné. En tout cas pas au moment où elle écrivait le livre. J’espère qu’un jour elle trouvera la paix et le repos.

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